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DU FRANÇAIS D'AFRIQUE AU FRANÇAIS EN FRANCOPHONIE : QUELQUES QUESTIONS D'AMÉNAGEMENT LEXICOGRAPHIQUE

 

Danièle Latin

AUPELF - UREF

 

 

 

L'effort théorique effectué en faveur d'une typologie descriptive des particularités lexicales du français appliquée aux situations africaines ne date pas d'hier. Et il m'est particulièrement agréable de souligner que cet apport original à la recherche linguistique et sociolinguistique en amont de la lexicographie des français de l'espace francophone doit beaucoup aux contributions personnelles du professeur Suzanne Lafage qui fut de ceux qui ont jeté les bases du projet scientifique aujourd'hui connu sous le label du groupe de recherche qui l'a conçu et mené à terme : l'IFA.

Ifa désigne à la fois une déesse de la fécondité chez les Yoruba[1] et l'abréviation courante de l'Inventaire des particularités lexicales du français en Afrique noire conçu et réalisé par l’Équipe IFA de 1976 à 1984[2] : le symbole contenu dans cette polysémie autonymique signifiait à la fois la créativité lexicale du français en Afrique, qui se trouvait pour la première fois systématiquement décrite, et la force en puissance d'une philosophie de recherche portant plus largement sur les variétés de français dans les pays du Sud de la francophonie, philosophie fondée sur un respect méthodique des réalités linguistiques, culturelles et discursives de ces français dans leur écologie propre. Le terme d’"écologie", que j'ai repris à Maurice Piron, vise moins les phénomènes liés au contexte discursif des faits de langue, moins les faits de contacts de langues eux-mêmes, calques et emprunts, moins les néologismes dus à des glissements de sens (restriction, extension ou métaphorisation) par rapport à des items lexicaux déjà reçus dans la langue française commune que l'ensemble de ces phénomènes de cooccurrences d'emploi originales dont procèdent les particularisations lexicales et qui apparaissent dans une norme régionale donnée de français. La notion d’"écologie" appliquée au phénomène langagier est, certes, imagée mais je l'utilise à dessein pour faire entendre que ce processus, par delà le mot, l'occurrence et ses récurrences, met en œuvre la totalité du contexte linguistique, historique et socioculturel d'un macrosystème de communication propre à une région géolinguistique donnée de langue française. C'est ce "territoire langagier" émanant des groupes sociaux qui le composent qui se trouve impliqué dans les phénomènes lexicogénétiques que nous cherchons à décrire à partir de l'appellation "particularités lexicales du français en Afrique noire". Ces processus sont de nature à faire émerger une variété de langue : seule la prise en compte du champ complet et de sa structure fonctionnelle permet d'en cerner la phénoménologie linguistique précise et l'épiphénomène qui la manifeste à partir de notre recherche est, en l'occurrence, le lexique.

Toutes spécificités concernant le mot (la lexie), sa morphologie (dérivation, composition), son sens, son intégration dans la chaîne syntagmatique (néologisme phraséologique), ses connotations, et, plus largement, ses conditions d'emploi (marques et registres) sont donc également importantes du point de vue de la méthodologie descriptive et synchronique préconisée par l’IFA, importantes et dignes d'être répertoriées : c'est pourquoi, d'entrée de jeu, les équipes de recherche attachées à ce projet se sont mises d'accord sur une grille typologique commune de la variation fonctionnelle des usages lexicaux couvrant tous les cas de figure possibles de ces faits de langue différentiels (par rapport au français normalisé) en contexte de contacts linguistiques et interculturels africains.

Cette grille typologique IFA fut formalisée et servit à la fois de modèle d'analyse commun pour la description lexicale des particularismes et de bordereau destiné à identifier les champs fonctionnels indexables d'une base de données lexicographiques à portée différentielle sur les zones africaines[3]. Cette informatisation s'est effectuée dès les premières années de la recherche à la demande de l'AUPELF. Cette base, associée au projet IFA, comprend actuellement quelques 20.000 fichiers de synthèse identifiables par pays et par noms d'auteurs.

Parmi les diverses présentations de la grille typologique qui servit de support théorique à cet aménagement, le schéma proposé par Suzanne Lafage dans son étude intitulée "Contribution à une analyse de l'organisation fonctionnelle du lexique français en Afrique Noire"[4] est sans aucun doute l'un des plus complets et l'un des plus riches sur le plan de l'intégration des aspects sociolinguistiques afférents. Il recouvre tous les cas de figure de variation et de mixité lexématiques et morpho-sémantiques qu'il nous ait été donné d'observer dans la recherche synchronique sur le lexique français en contexte plurilingue africain.

Ce modèle a été appliqué par l'auteur à différents pays d'Afrique et spécialement à la Côte-d'Ivoire et il a également été adapté à d'autres terrains de la francophonie du Sud[5].

La grille typologique élaborée vingt années plus tard dans le cadre des travaux du réseau "Étude du français en francophonie" par le professeur Claude Poirier, qui l'applique au terrain québécois, a donné quant à elle l'occasion d'un vaste débat sur la pertinence des paramètres de description aux différents terrains géolinguistiques de la francophonie, le clivage principal - si clivage il y eut - se manifestant entre le sous-ensemble que forment les situations de français exolingues[6] (où le français n'est pas langue maternelle et où il a fait l'objet d'une importation) et les situations de francophonie endolingue (communautés de langue romane où le français est langue première)[7].

La grille de Claude Poirier reprend pour l'essentiel dans sa visée différentielle les mêmes paramètres que la grille IFA. Les faits de langue relevant de différences de fréquence, de niveaux et d'emplois de langue, de connotation (terminologie de l'IFA) y sont toutefois regroupés en un seul champ fonctionnel libellé "québécismes de statut", ce qui représente à la fois un avantage sur le plan de la conceptualisation et un handicap au niveau de la description des cas lexicaux concrets (les marqueurs correspondant à ces différents traits pouvant être, selon le cas, convergents c. à. d. regroupés ou, au contraire, divergents). Par ailleurs, le protocole présenté à Louvain-la-Neuve par le professeur Claude Poirier comporte une extension en diachronie conforme aux objectifs du programme du Trésor des vocabulaires francophones, enrichissement qui n'était, pour des raisons méthodiques, qu'une perspective future dans le cadre des travaux de la description interafricaine. Cet enrichissement et des rubriques nouvelles qui permettent de recenser les aspects métalinguistiques et épilinguistiques de la description de la lexie à propos de chaque unité de traitement, constituent des aménagements pratiques et précieux pour la recherche et sa gestion informatique. Celles-ci sont d'autant plus utiles pour les pays du Nord que l'usage y est souvent fonction de la tradition philologique normative, cette situation n'ayant pas d'équivalent dans les pays de francophonie du Sud[8].

Le modèle typologique constitué par Claude Poirier et étendu au groupe des travaux de plusieurs pays du Nord (Belgique, France, Suisse, Québec) se propose d'acquérir une portée généralisante puisqu'il vise à servir de cadre informatisé commun à une banque de données lexicographiques panfrancophone. Le sentiment favorable des chercheurs envers une telle entreprise, initiée par le professeur Bernard Quémada, a été formulé à maintes reprises[9] et encore, tout récemment, lors de la tenue à Québec des quatrièmes journées scientifiques du réseau "Étude du français en francophonie", où le modèle de cette base de données a été présenté aux participants. L'on ne pourrait que se féliciter de son développement dans la mesure où une telle matrice devrait permettre une meilleure intermédiation des recherches sur le français en francophonie dans une perspective lexicographique.

L'idée d'un aménagement lexicographique du français en francophonie a donc fait du chemin en vingt ans. Outre les nombreux travaux d'inventaires à portée prédictionnairique réalisés par les équipes de recherche partagée du réseau déjà cité, il est intéressant de mentionner des initiatives qui abordent à présent le niveau du dictionnaire. Je voudrais toutefois, avant d'en porter un rapide témoignage, souligner en quoi un dictionnaire peut se différencier des travaux qui le précèdent, y compris sous la forme d'une banque de données conçue selon la même visée.

Il apparaît en premier lieu opportun de lever toute ambiguïté quant à la notion même de banque de données panfrancophone mise à l'honneur par Claude Poirier dans le cadre des travaux déjà cités du réseau de l'AUPELF-UREF. Je préférerais quant à moi parler de "banque de données interfrancophone" de manière à souligner l'exigence de relativisme structurel dans la visée comme dans la construction d'un tel objet destiné à présider à un aspect important de l'aménagement linguistique du français par la production de dictionnaires ouverts aux variétés francophones.

Une telle banque ne peut en effet se concevoir que comme une pluralité de banques reliées par la compatibilité de leurs paramètres descriptifs et gérée dans le cadre d'un partenariat international. S'il s'agissait en effet d'inclure la multiplicité des variétés de langue de l'espace francophone dans une banque unique, celle-ci exigerait pour chaque unité de traitement, outre l'indexation de tous les champs fonctionnels de la grille typologique évoquée plus haut à effet de description différentielle entre une variété régionale donnée et le français de référence, une indexation inverse ou réciproque permettant de faire valoir la fonction structurante de cette base à différents niveaux d'intégration fonctionnelle selon un continuum (à construire !) de convergences et de divergences. Ce dernier devrait nécessairement prendre en compte le niveau national (correspondant aux champs "français de Belgique", "français du Sénégal", "français de Tunisie", etc.), le niveau régional (regroupant en les interclassant les traits linguistiques communs à plusieurs pays d'un point de vue pertinent sur le plan géolinguistique ou sociolinguistique), le niveau transnational (situant les convergences se manifestant entre des particularisations lexicales dont l'idiosyncrasie n'est pas lexicologiquement pertinente) et, enfin, le niveau panfrancophone (conforme à une visée d'intégration relevant d'un aménagement linguistique scientifiquement justifié dans le respect des fonctionnalités précédentes et dans un système qui les subsume). La diversité des niveaux fonctionnels en seule synchronie fait comprendre pourquoi j'incline, pour ma part, à souligner la fonction d'interrelation plutôt que celle de cohésion, l'interfrancophone plutôt que le panfrancophone. Au reste, il ne parait possible à l'heure actuelle que d’"entrevoir" une telle banque car les études lexicogénétiques sur les différents terrains linguistiques de la francophonie, au Sud en particulier, ne sont pas suffisamment avancées pour qu'il soit permis de faire le départ entre simples idiosyncrasies apparentes - ou contingentes - et faits d'effective convergence. Par ailleurs, la plus grande des difficultés consistera sans aucun doute à situer dans leur articulation respective et corrélative les trois principaux paramètres de la variation linguistique, à savoir le chronolecte, le géolecte et le sociolecte, par rapport à la multiplicité des situations de francophonie à prendre en compte dans l'analyse.

Seule la maîtrise de ces trois dimensions permettra en effet de conserver dans le processus d'aménagement linguistique francophone la portée fonctionnelle de chaque norme régionale respective tout en l'articulant au système ou méta-système commun de référence. Par ailleurs, le nombre d'entités géolinguistiques scientifiquement fondé n'est pas identifiable a priori. Comme je l'ai suggéré ailleurs, la mise en œuvre de synthèses lexicographiques est en elle-même heuristique à cet égard (Latin D., 1995) car elle entraîne une reformulation du statut réciproque des unités d'une langue jusqu'alors comprises dans un champ de référence monovalent et restrictif (norme quasi exclusivement européenne).

Or, il s'agit aujourd'hui d'aménager le français à l'échelle de communautés relevant des écologies physiques (référentielles) et culturelles (signifiantes) de toutes les zones de la planète.

Dans cette logique, l'analyse actuellement engagée dans le cadre des inventaires nationaux et transnationaux de la francophonie du Sud et le processus de structuration que celle-ci autorise au niveau de variétés de français non encore normées constituent une approche utile à un tel aménagement. La démarche oblige en effet à respecter plusieurs filtrages et permet de situer par l'analyse intra- et interlinguistique le statut des particulari­tés ou variantes lexicales en les intégrant dans un système sémiotique cohérent qui constitue, avec la grammaire, le meilleur outil de référence d'une langue : le texte lexicographi­que[10].

Une première expérience de cet ordre a été entreprise sous l'égide de l'Aupelf et de Hachette-Edicef avec la publication d'un Dictionnaire universel destiné au public africain. Celui-ci constitue un premier dictionnaire fonctionnel de français pour l'Afrique[11]. La nomenclature générale du dictionnaire usuel de langue française contemporaine qui a servi de dictionnaire de base à cet aménagement lexicographique (en l'occurrence, le Dictionnaire encyclopédique illustré, Hachette, 1993) y a été entièrement revue et pondérée en fonction des besoins communicatifs propres à la francophonie africaine. De même, la phraséologie des définitions a été reformulée afin de gommer l'ethnocentrisme franco-européen du texte lexicographique et encyclopédique de référence et de rendre les définitions pragmatiques en contexte d'acquisition du français par des Africains. Ce dictionnaire, pour la partie "mots de la langue", a été réalisé sous ma coordination au titre de l'AUPELF-UREF avec la collaboration d'une vingtaine de spécialistes pédagogues africains et avec la collaboration de Geneviève N'Diaye Corréard, linguiste africaniste et spécialiste du français du Sénégal. Il intègre environ 3.000 unités de traitement : près de 1.500 africanismes proprement dits et autant de mots correspondant à un enrichissement de la nomenclature française dans différents domaines didactiques et de spécialité. Ces enrichissements permettent un rééquilibrage complet de la dénomination pour les zones intertropicales concernées. Les vocabulaires de la faune et de la flore se trouvent visés de façon particulièrement significative mais les autres domaines d'emploi ne sont pas en reste : médecine, géographie, géologie, agronomie, histoire, droit, religions (l'Islam y étant introduit et la religion catholique relativisée), ethnolinguistique (une systématique des langues africaines et des ethniques s'y trouve introduite), technologies, sciences de l'environnement, etc.

La plupart des apports lexicaux originaux rattachés à des paradigmes de formation endogène c.à.d. relevant du français véhiculaire dans sa ou ses normes régionale(s) - les dites particularités -, s'y trouvent également insérés selon un aménagement systématique qui les situent de façon fonctionnelle dans le corpus lexicographique de la langue générale.

Ainsi, le mot bolon, terme d'hydrologie, y est introduit en raison de son emploi courant au Sénégal et son entrée dans la nomenclature y est structurée par la métalangue lexicographique qui le définit comme suit :

bolon [bol.m. HYDROL. (Courant au Sénégal) Chenal de marée dans les zones de mangroves. Des bolons bordés de palétuviers.

De la même manière, le néologisme de composition propre au français d'Afrique cécité des rivières vient enrichir l'article général cécité. Précédé de la marque géographique (Afrique) indiquant son statut de particularité lexicale propre à cette région, il est glosé par "onchocercose", terme du français médical introduit dans la nomenclature et défini comme tel. L'aménagement lexicographique du lexique de français régional dans le dictionnaire s'accompagne donc d'un aménagement linguistique général du français de référence, référence qui s'en trouve d'autant élargie entraînant avec elle les contextes socioculturels et les contenus encyclopédiques qui s'y rattachent.

Néanmoins, l'apport rédactionnel africain de ce dictionnaire dans ce français universel introduit dans la macrostructure une norme fonctionnelle différentielle qui n'y était pas jusqu'alors prévue, ce qui transforme l'économie de la lisibilité du dictionnaire de langue. Les renvois synonymiques d'un mot de la nomenclature à l'autre précisent et explicitent de même les différents niveaux d'intégration fonctionnels (général versus régional) ou, si l'on préfère, les deux normes linguistiques prises en compte, la norme régionale africaine y étant marquée par la convention géographique "(Afrique)" à chaque unité de traitement utile et à tous les niveaux fonctionnels : graphique, morphologique, sémantique, syntaxique, sociolinguistique (marques d'usage social et registres, connotations). Seul le niveau phonétique n'a pas été traité selon ce principe différentiel en raison de la difficulté théorique que ce type d'ouverture pourrait entraîner sur le plan linguistique (toutes les entrées du dictionnaire sont accompagnées d'une transcription phonétique normalisée selon une forme conforme au système phonologique français et transcrite selon le système de l'API).

Les renvois à l'intérieur du corpus relatif à la variété africaine sont indiqués sans mention spéciale : ainsi, à l'article carré, n.m., le sens (Afrique) "Lot de terrain bâti qui constitue une unité d'habitation" est suivi du néologisme de composition chef de carré qui illustre le sens tout en identifiant le paradigme africain. Le dictionnaire fournit ensuite un synonyme dans la même variété de langue. : Syn. concession. Sous l'article concession, n.f., le Dictionnaire universel définit le sens concerné de la façon suivante :

3. (Afrique) Lot de terrain destiné à la construction d'habitation > Terrain bâti constituant une unité d'habitation. Le feu a détruit toutes les cases de la concession. Syn. carré.

Si l'usage régional africain contient des réalisations syntagmatiques significatives, celles-ci sont fournies dans la plage sémantique qui leur correspond. Par exemple, pour le mot cola, le dictionnaire fournira, après la mention des variantes graphiques et grammaticales de genre, une définition botanique (enrichie, vu l'importance de cette graine en Afrique) et y adjoindra les emplois les plus lexicalisés dans la langue courante régionale (composés, sens, cooccurrences, syntagmes) définis dans leur contexte culturel propre : ~

cola ou kola [kOla] n. f. ou m. 1. Graine du colatier, appelée aussi noix de cola, riche en caféine et en théobromine, que l'on mastique en Afrique pour ses vertus stimulantes et que l'on utilise comme teinture. Cola blanche, cola rouge. - (Afrique) Pagne à la cola, teint avec une teinture à base de cola. - (Afrique) Feuille de cola : nom cour. donné à une plante à grandes feuilles ovales vernissées, commune dans la forêt tropicale africaine. - (Afrique) Petit cola : fruit d'un arbre (genre Garcinia) aux vertus aphrodisiaques > (Afrique) Prix de la cola : cadeau en argent, pourboire. 2. (Afrique) Cadeau offert selon la tradition en certaines circonstances et qui consistait à l'origine en noix de cola. Donner la cola.

Ces brefs exemples suffisent à rendre compte du travail d'intégration que représente l'enchâssement d'un dictionnaire de variété régionale dans un dictionnaire de français universel et prouvent, si besoin était, combien la lisibilité du dictionnaire s'en trouve indexée à tous les niveaux fonctionnels du texte lexicographique. Variantes graphiques et renvois synonymiques assurent la lisibilité circulaire du sens entre microstructure et macrostructure selon une distribution différentielle (français général versus régional), distribution qui découle elle-même directement de la typologie de la particularité évoquée plus haut. Le dictionnaire intégrant la variété de langue constitue néanmoins un aménagement excédentaire par rapport à cette simple grille typologique puisqu'il fait intervenir deux structurations lexicographiques, l'une signifiante au plan de la langue générale, l'autre au niveau du sous-système de la variété régionale qui se trouve désormais diffus (mais non confondu) dans la structure d'ensemble (macrostructure et microstructure).

Ce niveau d'intégration supplémentaire par rapport aux grilles typologiques reçues, niveau que Suzanne Lafage avait eu le mérite de notifier dans son schéma sur l'organisation fonctionnelle du lexique français en Afrique francophone[12], est précisément celui qui permet de relier le lexique différentiel au lexique de la langue de référence. Le lexique différentiel peut être traité comme un dictionnaire fonctionnel enchâssé dans le dictionnaire général - comme c'est le cas pour le Dictionnaire universel (Afrique) ou encore pour le Dictionnaire du français plus par rapport à la norme régionale du français d'Amérique du Nord[13]. Dans le cas du Dictionnaire universel, fondé sur une compétence spécialisée et sur une sensibilité africaine, l'intégration des apports n'a entraîné aucun nivellement à la norme française et a permis une valorisation de l'Afrique dans le spectre scientifique et didactique général. Dans un tel contexte ou, si l'on préfère, une telle "écologie" du texte didactique, l'outil linguistique constitué permet une acceptabilité optimale des "africanismes" qui y ont été introduits et, par conséquent, légitimés avec les repères d'usage qui s'imposent (la marque géographique limitant la sphère de pertinence d'emploi des usages y est elle-même nuancée de marques d'usage indiquant le niveau de langue ou l'état de langue, la fréquence, etc.).

L'aménagement lexicographique peut prendre une portée de véritable aménagement linguistique, de nombreux mots et termes relevant de la norme régionale courante exigeant, en effet, pour être définis des termes génériques qui relèvent de la langue scientifique et qui n'étaient pas préalablement inclus dans la nomenclature du dictionnaire de base (de référence française) : par exemple, le mot néré est dans le Dictionnaire universel dûment défini non seulement parce qu'il participe à l'écologie des productions alimentaires africaines mais encore parce qu'il sert à formuler la définition française de mots locaux comme soumbala, par exemple. Le dictionnaire peut donc légitimer la définition du mot :

soumbala [sumbala] n.m. Pâte noire à odeur forte, tirée des fruits du néré, qui sert de condiment.

parce que la nomenclature introduit la définition suivante :

néré [neRe] ou nété [nete] n.m. (Afrique) Arbre d'Afrique tropicale (fam. mimosacées) à usage médicinal, et dont les fruits écrasés et fermentés fournissent un condiment, le soumbala.

La question ne se pose pas de façon foncièrement différente pour un dictionnaire qui traitera dans son corpus plusieurs variétés francophones. La règle d'indexation multipliera toutefois son champ d'application d'autant, rendant la maîtrise et le respect différentiel des variantes régionales plus complexe en raison, notamment, de leur chevauchement souvent aléatoire. Encore faut-il que les responsables de la conception du dictionnaire s'entendent pour défendre la philosophie que nous venons de définir : l'aménagement lexicographique d'un français régional dans le dictionnaire de langue générale ne peut s'y trouver greffer mais doit, pour être légitime, s'accompagner d'un aménagement corollaire de la nomenclature générale (permettant de trouver des définisseurs adéquats pour les mots et les sens régionaux et locaux). Il doit également respecter dans la phraséologie et dans les subdivisions de la microstructure des articles une alternance rigoureuse entre des marqueurs ad hoc, destinés à la distinction des fonctionnalités respectives aux différente normes locales (endogènes), et les marqueurs rendant compte de la norme générale (de référence).

Le dictionnaire universel francophone[14], dont j'ai assuré récemment la coordination scientifique et rédactionnelle pour la partie "mots de la langue" dans le cadre du même partenariat entre l'Aupelf-Uref et de la Maison Hachette-Edicef, s'efforce de répondre à cette nouvelle logique. Ce dictionnaire de langue intègre différentiellement des sous-dictionnaires pour toutes les zones partenaires de la Francophonie institutionnelle possédant une variation linguistique. Ces zones, pondérés quantitativement en fonction de l'importance respective des francophonies existantes, détiennent un marqueur propre qui s'inscrit dans les plages des articles du dictionnaire comme autant de territorialités des sens et emplois, les convergences étant rendues visibles par le regroupement alphabétique de ces marques dans une même parenthèse en tête de chaque unité de traitement. Ces marques sont les suivantes :

Acadie, Afr. subsah. (= Afrique subsaharienne), Antilles fr. (Martinique, Guadeloupe), Aoste, Asie du S.-E. (Viêt-nam, Laos, Cambodge), Belgique, Djibouti, Égypte, France rég. (= mots du français régional de France), Guadeloupe (quand spécifique), Guyane, Haïti, Laos, Liban, Louisiane, Luxembourg, Madag. (= Madagascar), Maghreb, Mart. (= Martinique seule), Maurice, Nouv.-Cal. (Nouvelle-Calédonie), oc.Indien (Seychelles, Comores, Maurice, la Réunion), Pacifique (Nouvelle-Calédonie, Vanuatu), Polynésie fr. (Tahiti, Wallis-et-Futuna), Proche-Orient, Québec, Siant-Pierre-et-M. (=  Miquelon), Suisse, Tahiti (seul), Vanuatu (seul), Viêt-nam (seul), Wallis-et-Futuna (seul). Ces marques jouent également dans le dictionnaire comme références des contenus encyclopédiques, ce qui justifie la présence de certaines d'entre elles n'ayant pas de portée significative pour les variétés régionales de la langue.

La nomenclature ajoutée et traitée lexicographiquement par rapport à la francophonie linguistique est de l'ordre de 10.000 entrées ou sous-entrées, ce qui donne une mesure de l'importance de la transformation apportée.

Le corpus de la base régionale africaine, qui était déjà introduit dans le dictionnaire universel, a été conservé mais a subi de sensibles modifications, la nomenclature du dictionnaire universel francophone étant évidemment fort différente en raison des apports francophones et de par le nouvel aménagement que celui-ci a entraîné au niveau des entrées de la langue générale afin de traiter les paradigmes exhaustivement.

La visée généralisante du dictionnaire francophone a également exigé une refonte relative des définitions du corpus africain. Ainsi, les entrées botaniques et zoologiques y ont été redéfinies de façon à illustrer les espèces de l'ensemble des zones climatiques, le dictionnaire destiné à l'Afrique ayant logiquement privilégié les espèces présentes sur ce seul continent au détriment d'autres, également importantes pour les zones correspondantes d'Amérique et d'Asie. Les définitions de mots régionaux africains ont donc parfois été nuancées afin de restituer un niveau supérieur de généralité dans la lisibilité sans pour autant occulter les singularisations qui font l'objet de renvois ou de définitions propres. Pour reprendre le même exemple que plus haut, le soumbala y a été conservé mais le condiment qui en est tiré y a été défini par son nom français "moutarde de néré" dans la définition scientifique de l'entrée néré. Ce qui signifie que l'on a développé pour l'ensemble des nomenclatures régionales une norme de généralisation supérieure permettant l'indexation lexicographique d'une plus grande diversité d'équivalences locales, celles-ci étant par ailleurs regroupées en tant qu'équivalences, avec leurs marques géolinguistiques distinctives, au niveau du mot français de référence. Il n'est pas rare, en effet, que les mots vernaculaires relevant des normes régionales interfèrent leur portée de désignation, les polysémies vernaculaires devant dès lors être rectifiées au niveau de la métalangue du dictionnaire qui établit à cet effet un système de renvois surdéterminant les liens entre les diverses normes régionales d'une part, celles-ci et la norme de référence, d'autre part. Tel est le cas pour le paradigme cachiman, corossol, cœur de bœuf, par exemple.

Le système permet tout à la fois de respecter la notification de la diversité fonctionnelle des usages francophones et de renforcer la cohésion du français général. Nous ne donnerons d'une telle distribution paradigmatique indexée qu'un court exemple significatif pour les zones intertropicales en raison des contraintes imposées par la limitation matérielle de cette étude :

gecko [Zeko] n.m. Reptile saurien des régions chaudes (genre Gekkomidae) aux doigts munis de lamelles adhésives. Syn. (Antilles fr., Haïti) mabouillat et mabouya, (Antilles fr., Nouv.-Cal., oc. Indien) margouillat.

 

mabouillat ou mabouya [mabuja] n.m. (Antilles fr., Haïti) Syn. de gecko. (V. margouillat).

 

margouillat [maRguja] n.m. 1. ZOOL. Lézard d'Afrique occidentale, qui se pare de couleurs vives en période reproductive. 2. (Antilles fr., Nouv.-Cal., oc. Indien) Syn. de gecko. (V. mabouillat).

 

La même règle de distribution joue pour l'ensemble du champ francophone. Citons seulement à titre d'illustration d'indexation Nord-Sud le paradigme francophone de "taille-crayon" :

aiguise-crayon [egizkRej_O] n.m. (Québec) Syn. de aiguisoir (sens 2) Des aiguise-crayons.

 

aiguisoir [egizwaR] n.m. 1. Outil à aiguiser. 2. (Maurice, Québec) Syn. de taille-crayon. Syn. (Québec) aiguise-crayon.

 

2.taille [taj] n.m. ou f. (Afr. subsah., Wallis-et-F.) Syn. de taille-crayon.

 

taille-crayon(s) [tajkRej_O] . Petit instrument à lame(s) servant à tailler les crayons. Des taille-crayon(s). Syn. (Québec) aiguise-crayon et aiguisoir, (Maurice) fitoir, (Afr. subsah., Wallis-et-F.) taille.

 

fitoir [fitwaR] n.m. (Maurice) Fam. Plaisant. Taille-crayon. Syn. aiguisoir.

 

Les autres variantes fonctionnelles s'inscriront dans le champ logique des marques géographiques dont elles relèvent, par exemple :

2. brailler (se) [bRaje] v. pron. Vx (Cour. en Afr. subsah.) Ajuster sa chemise dans son pantalon.

 

La tâche d'aménagement lexicographique de la variété linguistique en francophonie n'est pas une tâche simple et l'on s'est contenté dans ce premier essai du genre d'intégrer les variétés régionales du français à partir de ce que l'on maîtrise actuellement de la variation lexicale en synchronie, tout en sachant que le découpage géopolitique qui est opéré est provisoire et partiel et qu'il est susceptible d’appeler d'autres aménagements (au vu, notamment, des avancées de la recherche sociolinguistique et de la lexicologie diachronique). Au seul niveau de la synchronie, la richesse polysémique du français hors de France et les incidences qu'elle entraîne sur la langue de référence elle-même sont considérables : il ne nous est pas possible de les expliciter dans le cadre de cet article. Mais l'essentiel était de témoigner de l'existence d'un processus en marche. Il reste que l'enchâssement textuel des variétés régionales dans l'économie propre du dictionnaire de langue constitue un aménagement lexicographique en tant que tel pour lequel les bases de données ne peuvent fournir que des matériaux et des repères indicatifs de distribution puisque ce travail structurel entraîne, par voie conséquente, un remaniement du corpus du français de référence dans lequel il s'inscrit.

Les choix qui président au nouveau modèle du dictionnaire restent entiers en aval de l'identification des matériaux linguistiques de base. Ils relèvent de la responsabilité des concepteurs du dictionnaire et des producteurs qui assument le profil du produit en fonction d'objectifs propres où le commercial et le scientifique doivent trouver les meilleurs compromis possibles : soutenir une philosophie de l'intégration du français de la francophonie dans le contexte géopolitique actuel est relativement facile, imposer le respect des différences linguistiques et culturelles dans cette entreprise d'aménagement linguistique l'est déjà moins, et cela représente un enjeu d'importance si l'on songe que l'image idéologique que les dictionnaires donneront du français et de ses communautés partenaires présidera à l'enseignement de la langue et des valeurs de civilisation dont cette langue sera porteuse pour les générations futures.

L'effort d'intermédiation entre le terrain d'observation du (socio)linguiste et le travail de formalisation des industries de la langue est peut-être audacieux, semé de difficultés certes, mais il justifie que l'on s'y attache avec modestie, pugnacité et ferveur.

Tel se veut l'esprit de mon témoignage.

 

 

Bibliographie

 

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[1] Il s'agit d'une coupe de devination de l'oracle Ifa (Nigeria), Musée de Zürich, photographie : Wettstein et Kauf.

[2] Équipe IFA. Blondé (J.), Canu (G.), Caprile (J.-P.), Deltel (J.R.), Dumont (P.), Efoua-Zengue (R.), Faïk (S.), Gontier (D.), Jouannet (F.), Lafage (S.), Mendo Ze (G.), N'Diaye Corréard (G.), Queffélec (A.), Queffélec (C.), Racelle-Latin D. (Coordonnatrice), Rondreux (J.-L.), Schmidt (J.), Shyirambere (S.), Tabi-Manga (S.) Inventaire des particularités lexicales du français en Afrique noire. 1983. AUPELF. (1988). Paris, EDICEF/AUPELF, coll. "Universités francophones". 1ère édition AUPELF, 1983.

[3] Cette banque a été constituée par mes soins avec la collaboration informatique de Louis Delatte, Joseph Denooz et Marie-Christine Lochen au Laboratoire d'Analyse statistique des langues anciennes (LASLA) et réactualisée et aménagée ensuite à partir de 1990 dans le cadre de la même convention pour les travaux africains du Réseau "Étude du français en francophonie" de l'AUPELF-UREF avec la collaboration de M. Karel Logist et du CIPL, Centre conjoint au LASLA. Cette banque de données est actuellement logée au Bureau Afrique de l'AUPELF-UREF à Dakar dans le cadre de la coordination du réseau avec une veille informatique de l'Université de Liège.

[4] Lafage, Suzanne, "Contribution à une analyse de l'organisation fonctionnelle du lexique français en Afrique francophone" dans Annales de l'Université d'Abidjan, fasc. 1, série H, pp. 41-52.

[5] Pour un commentaire détaillé sur cette application, l'on voudra bien se reporter à Pauleau Christine, "La variation du français en Nouvelle-Calédonie", in Francard M., Latin D. (éds), Le régionalisme lexical, 1995, pp. 203-211.

[6] La distinction est proposée par Suzanne Lafage dans sa communication aux deuxièmes journées scientifiques du réseau "Étude du français en francophonie" de Louvain-la-Neuve qui étaient centrées sur la discussion de la grille proposée par Claude Poirier. Cf. Lafage, Suzanne, "De la particularité lexicale à la variante géographique ? Une notion évolutive en contexte exolingue", in Francard M., Latin D. (éds), Le régionalisme lexical, 1995, pp. 89-97.

[7] Poirier, Claude, "Les variantes topolectales du lexique français. Proposition de classement à partir d'exemples québécois", in Francard M., Latin, D. (éds), Le régionalisme lexical, 1995, pp. 13-65

[8] Par absence de textes réflexifs d'une réelle autorité sociale sur les normes d'usage concernées. Si l'on excepte quelques études portant sur le français à l'époque coloniale ainsi que des articles ou des glossaires tels que les travaux de Louis-Fernand Flutre à propos "De quelques termes de la langue commerciale utilisée sur les côtes de l'Afrique occidentale et qui ont passé dans les récits des voyageurs français du temps" (Etymologica Festschrift W. von Wartburg, Tübingen : 1958. pp. 209-238) ou encore l'excellent Glossaire des expressions et termes locaux employés dans l'ouest africain de Raymond Mauny, 1952. Dakar, IFAN, les travaux descriptifs relatifs aux particularismes lexicaux du français en Afrique noire ont tous essentiellement une visée synchroni­que et descriptive (non normative). Le mérite revient à Jean Schmidt et Geneviève N'Diaye Corréard d'avoir repris la dimension diachronique de ces études pour le Sénégal, à Willy Bal de l'avoir initiée pour l'ex-Congo belge, l'ex-Zaïre et les "mots-voyageurs", particulièrement ceux issus de l'Afrique lusophone.

[9] Notamment par Suzanne Lafage et par Jean Tabi-Manga lors dans leur communication respective aux premières journées scientifiques du réseau "Étude du français en francophonie", in Latin D. , Queffélec A., Tabi-Manga J. (éds), Inventaire des usages de la francophonie : nomenclatures et méthodologies, 1993.

[10] Au reste, les dictionnaires intègrent toujours davantage la grammaire : la sémantique et la syntaxe se combinent dans la génération des particularismes lexicaux et dans leur articulation systémique. Au point que l'on pourrait reconnaître dans une "sémantaxe" (selon la notion de Gabriel Mannessy) une des clés de l'analyse variationiste.

[11] Dictionnaire universel (Afrique). AUPELF-UREF/Hachette-EDICEF, 1997. Direction : Michel Guillou, Marc Moingeon. Coordination scientifique pour l'AUPELF-UREF : Danièle Latin. Rédaction : Geneviève N'Diaye Corréard. Éditeur et coordination générale : Thierry Viellard. Responsabilité éditoriale : Mireille Maurin.

[12] Ce schéma prévoit en effet une double indexation de l'ensemble des facteurs typologiques définis, une première fois par rapport au système des formes attestées en français de référence, une seconde fois à l'intérieur du champ de la variété africaine appelé "néologismes" et qui reprend l'ensemble des configurations étiologiques propres aux formations locales d'une part, aux emprunts d'autre part.

[13] Dictionnaire du français plus à l'usage des francophones d'Amérique du Nord. Édition établie sous la responsabilité de A.E. Shiaty. Rédacteur principal : Claude Poirier, Centre éducatif et culturel inc., 1988.

[14] Dictionnaire universel francophone. AUPELF-UREF/ HACHETTE-EDICEF, 1998. Direction : Michel Guillou, Marc Moingeon. Coordination scientifique pour l'AUPELF-UREF (partie "Mots de la langue") : Danièle Latin. Rédaction et intégration des bases régionales : Danièle Latin et Véronique Chape-Plazotta (avec la collaboration de Claude Poirier pour la base Amérique du Nord). Édition et coordination générale : Hubert Lucot. Responsabilité éditoriale : Jacques Demougin.